vendredi 16 août 2013

Issy Kol, le temps s'accélère



Nous filons vers la rive sud d’Issy Kol, le plus grand lac du Khirgiztan, véritable mer intérieure et dernière étape de notre parcours en Asie centrale (gloups !). Le lac est l’œil géant du poisson auquel ressemble le Kirghiztan. Premier arrêt dans un bled paumé (Bonkobayevo) dont le souvenir sera celui d’un formidable orage qui nous a transpercés jusqu’à l’os et inondé les rues en quelques secondes. Nous poussons ensuite un peu plus loin vers Tamga sur le lac. Changement presque radical, nous sommes dans ce qu’on pourrait appeler la Khirgizie blanche. Les russes, nombreux et les kazakhs viennent en vacances ici. Mais on ne les remarque pas de façon évidente car le métissage des populations « russes » et « khirguizes » est manifeste. La couleur des peaux, la forme des yeux sont celles d’une riche diversité.  Des maisons dont la partie supérieure est en bois ont fait leur apparition, sortes de chalets de montagne tronqués. Nous logeons dans une pension russe dont le jardin et inondé de fleurs et aussi d’abricots. Les abricotiers sont partout, les fruits oranges jonchent le sol sous les arbres dont les branches ploient sous la multitude fruitière.  

 
Le lac est aménagé avec des plages côtières. L’eau est bonne et nous passons une journée à la mer sous un soleil de saison. Nous repartons le lendemain en minibus. Attente près de 20 minutes à peine sous un abris-bus assez moche couverts de mosaïques grossières, avec une transsexuelle, sa copine, une grand-mère et un enfant qu’elle garde, de un an environ. Celle-ci a quitté l’Ouzbékistan pour s’installer ici, c’est tout ce que nous comprenons dans son long discours en russe. Beau petit moment pour une courte attente. 
Achetés au kilo, ils sont partout.
Nous longeons le lac et traversons des zones où les champs sont grands et les moissonneuses batteuses. Pas d’ânes à l’horizon. Song Kol est loin.
Karakol, à l’est du lac, nous accueille alors pour une dernière halte avant retour vers le futur à Bishkek. La ville nous plait. Elle porte pourtant les stigmates de l’ère soviétique que l’on a vus ailleurs avec ses rues toutes à angle droit, des vieux bâtiments sans âme et monuments délavés. Mais ces édifices semblent abandonnés et non remplacés probablement par manque de fonds. Les parcs sont peu entretenus, les plantes prennent l’espace, les points d’arrosage sont rouillés. L’herbe a envahi par endroits le bitume et à distance du centre les rues sont vertes et ombragées, les arbres seuls éléments verticaux du décor, intensifiant l’obscurité du soir maîtresse des lieux en l’absence de lampadaires. Les volets et les portails de bois sont souvent peints en bleu ou vert. Les enfants, quelques chèvres ou moutons occupent les routes de terre traversées par de rares voitures. 

 



 
La ville de 70000 habitants où très peu d’immeubles ont poussé s’étend jusqu’aux montagnes avoisinantes. Dans le centre on trouve pas mal de points de restauration, du wifi dans de nombreux endroits. Le bazar, d’où partent et arrivent les minibus, est assez mignon, les sauts d’abricots ont été rejoints par quelques autres, faits du même plastique, remplis de framboises ou de myrtilles. 


Une église orthodoxe tout en bois dresse ses toits peints surmontés de coupoles doréee. Elle ressemble à une grosse maquette construite en pinces à linge. A l’intérieur, un prêtre aux cheveux longs, revêtu d’une toge épaisse rouge brodée d’or, fait une prière très cérémoniale, non pas entouré (il faudrait du monde pour cela) mais assisté de 2 femmes qui chantent et d’un garçon d’une douzaine d’années en habit rouge. Un homme, blanc, prie debout, les bras croisés, la queue de cheval. Un deuxième arrive, physiquement similaire au premier. L’endroit est vide et le rituel assez incongru vu de l’extérieur. A quelques rues de là on trouve un zoo terrifiant. Cages rouillées, espaces étriqués, animaux pas vraiment chouchoutés. C’est assez troublant de trouver enfermés des ânes, des chèvres, des moutons, des chevaux (et aussi des lynx, ours…) dans un pays où l’immensité leur est dédiée. Visite d’une mosquée chinoise assez mignonne.



Nous retrouvons la montagne de près en déposant l’empreinte de nos pas dans la vallée de Jety Oguz. Très belle montée à partir d’un sanatorium entouré de canyons rouges. Le chemin passe et repasse une rivière tumultueuse pour déboucher sur de grandes prairies lumineuses. Un camp de yourtes a été planté là pour les besoins d’un film dont nous assistons au tournage. Descente en stop puis taxi pour revenir à karakol. 

 
 
Le lendemain, petite surprise pour les enfants. Nous avons prévu 3 heures de balades à cheval, comme un petit écho à Song Kol. Rien à voir cependant. Le décor est radicalement différent, péri urbain, le tracé domine la ville sans s’en éloigner vraiment. Le guide est très prudent, nous toujours insouciants. Il ne veut pas que l’on fasse du trot (le galop, n’en parlons pas) car les chevaux ne sont pas faciles à contrôler. Nos montures sont plus hautes que celles de Song Kol et prêtes à partir vite pour celles de Maolann et Phanie. La promenade se termine d’une drôle de façon car nous rejoignons directement l’hippodrome, en passant dans la ville, en traversant même une cité. Il semble s'y dérouler un match de Bouzkachi, sport national khirgize (comme en ouzbékistan ou Afghanistan d’ailleurs). Le guide nous propose alors de terminer notre petite excursion là-bas. Nous sommes chanceux car il y a effectivement un tournoi de Bouzkachi. Les épreuves de ce sport se déroulent habituellement en hiver et la finale nationale en juin à Bishkek. Deux équipes d’une dizaines de cavaliers s’affrontent mais ils ne sont jamais plus de 8 sur le terrain, se remplaçant sans cesse les uns les autres selon les phases de jeu. L'objectif est de marquer des buts en déposant dans un panier géant en pierre (1 mètre 50 de haut, 3 de diamètre) le corps d’une chèvre décapitée (peut être remplie d’eau mais c’est incertain). La bête-ballon n’est pas du tout sanguinolente et doit peser bonbon. Elle est déposée au sol et au coup de sifflet de l’arbitre les cavaliers foncent comme des fous pour la ramasser au sol puis tenter d’apporter la baudruche à poil vers un but. L’engagement est diabolique, les joueurs s’arrachent la lourde peluche dans de véritables corps à corps où hommes et bêtes se confondent, où les cravaches cinglent. Mêlées répétées à 100 à l’heure, les corps et les pelages exultent, ils brillent de sueurs mélangées. Nous sommes trop contents de retrouver nos garçons-chevaux dans cette procession sans concessions.

 
 
 
 


Visite aux aurores du marché aux bestiaux dominical. Il pleut à verse rendant l’endroit impraticable et loufoque. Les vendeurs sont debouts sous la pluie, les pieds dans la boue, la tête sous un parapluie ou un imperméable ou pas grand-chose. Certains, dans leur voiture, tiennent au bout d’une corde une ou plusieurs bêtes, généralement des moutons collés à la carrosserie et transis sous les cordes d’eau qui les amaigrissent terriblement leur laine étant réduite à une serpillière détrempée. Pendant que l’eau finit de nous envahir en profondeur, nous nous laissons bousculer par le tumulte de chevaux, de vaches, de moutons, de voitures et d’hommes, sur le qui-vive car nous nous retrouvons bien vite ballottés entre un animal et son propriétaire la corde qui les relie nous poussant vers les flaques parfois violemment. 

La revanche des moutons?
Nouvelle belle rencontre  de voyage avec Jean et Michèle, jeunes québécois d’une soixantaine d’années qui ont fait un bon bout de chemin en Chine pendant 3 mois et continue un périple de plusieurs mois.



Vertèbre de vache ou chat des prairies?