Une voiture nous mène vers la
frontière avec le Kirghiztan. Dernier passage terrestre de ces démarcations
bordées de barbelés et d’uniformes. Il y a du monde ; mais, comme
lors du passage du Turkménistan vers l’Ouzbekistan, on nous fait passer devant
toute la file, nous sommes des grugeurs officiels, encouragés par les forces de
l’ordre. Du reste, les ouzbeks qui attendent ne semblent pas s’en émouvoir
outre mesure et en rigolent. Les contrôles sont légers, une frontière light
comme nous en avions perdu l’habitude.
Le taxi nous pose ensuite à Och à
quelques encablures de la guesthouse qu’il ne connait pas. Manifestement il n’a
pas vraiment l’intention de chercher plus loin. Nous finissons par trouver
l’hotel derrière le stade décrépi mais dont la pelouse est en parfait état
(elle est utilisée pour les matchs officiels de football). Nous retrouvons nos
amis suisses Rico et Madeleine rencontrés à Samarcande et avec les filles
desquels Jade aime jouer même si elles sont plus jeunes. L’hotel est un peu un hospice pour voyageurs en rade. Une famille
française avec deux garcons de 15 et 13 ans est plantée ici depuis un mois
après avoir cassé la boite de vitesse de leur monstrueux 15 tonnes embourbé
dans les steppes tadjikes. Un jeune couple anglais attend depuis pas mal
de jours que la fourche de leur moto soit réparée. Les cycliste exténués par leur virée tadjike récupèrent. Balade dans la ville
qui nous plait sur le champ. Le glauque ouzbek n’est pas perçu ici. Les rues
sont plus à échelle humaine et les humains sont plus vivants et habitants de
l’espace public. Les bâtiments vieillots ne sont pas réellement d’une
beauté manifeste mais la vie urbaine l’emporte largement.
Les chapeaux
traditionnels des hommes se sont allongés vers le ciel et ornent le chef de
nombreux kirghizes agés mais aussi plus jeunes. Ils ont des têtes incroyables
et des mentons prolongés souvent par une barbichette. Les femmes sont en robes
assez colorées et ont pour bon nombre d'entre elles un fichu qui encercle leurs
visages. Les visages globalement sont asiatiques, bruns. L'or dentaire a traversé la frontière et décore ici aussi les sourires. Le bazar qui attire ses lots de fruits et légumes, de vêtements et
accessoires en tout genre est convivial et les couvre-chef variés qui s'y
croisent nous dilatent les prunelles. Le long de la rivière urbaine, propre,
les hommes bronzent en maillot de bain. Plusieurs piscines énormes, remplies de
l’eau de la rivière, finissent par nous accueillir sans que nous ayions offert
de résistance. Les bassins contiennent une eau glacée, bleu nucléaire sur fond blanc. Des distributeurs d’argent refont leur apparition en
même temps que le marché noir a lui disparu.
Les rues de Och
sont bitumées pour la plupart mais pas mal sont encore couvertes de cailloux et
de poussière. Dans les rues du centre, le marché déborde de toutes parts et les
fruits et légumes sont vendus sur le trottoir. Les gens s’affairent, se
croisent dans tous les sens, les chauffeurs des taxis collectifs crient le nom
de leur destination, les boutiques de téléphone sont nombreuses. Le long d’une
petite grille séparant à un endroit le trottoir de la route une femme âgée
prédit l’avenir à une moins vieille en manipulant des cailloux et une lanière
sur un carton renversé sur le sol. Dans le parc sur le bord de la rivière se
tiennent les stands nombreux d’une fête foraine. On entend les chants faux des
chanteurs de karaoke. Des hommes jouent aux échecs autour d’une longue table
sur la laquelle une dizaine d’échiquiers sont alignés. Les visages des joueurs
et de ceux qui les entourent de près sont incroyables, les chapeaux de tout
poil. Les bancs du parc sont comme des décors de théâtre où les gens posent en
discutant. Mes favoris sont les petits vieux qui semblent immortels dans leur
habit traditionnel, le visage prolongé par ces toques de feutres folkloriques.
oh la joie de retrouver un ordinateur perso et de pouvoir à volonté tout lire! Bon, je n'ai pas tout lu mon retard : j'ai juste lu Och et apprécié les belles photos tout autant que le style du narrateur. D'ailleurs à propos de plaisir des yeux, de chez Éric à l'Épine j'ai fait vite sans prendre le temps de dire à Phanie combien ses dessins sont superbes. Une merveille! Merci! un vrai régal!
RépondreSupprimerJe vous retrouve très vite sur le blog mais en attendant plein de bizoux tout chauds du dedans comme du dehors odile
j'ai hâte de tout lire
J'adorerais avoir un chapeau comme ça!
RépondreSupprimerL'entrelacs de photos et de textes devient réellement envoûtant: tout juste si je n'ai pas aux narines le parfum des viandes grillées et des mijotis (et aussi des gaz d'échappement et des poubelles), aux oreilles les voix des gens qui discutent et les bruits de la rue...enfin je m'y crois presque.
L.B